Chouette La Vie depuis 2004 - Blog's not dead !

mardi 9 juillet 2019

Terre de liberté, de Anne McCaffrey



     Présentation

     Terre de liberté est un roman d’environ 350 pages, écrit par Anne McCaffrey. Il a été publié en France pour la première fois en 1999, et a connu une réédition l’année suivante. Terre de liberté fait partie du Cycle des hommes libres, qui fait lui-même partie de la série La Trilogie des forces, co-écrite avec Elizabeth Ann Scarborough. Le roman a été traduit par Thomas Bauduret, et illustré par Wojtek Siudmak.



Une image de Sarah Pflug sur Burst *


     Le livre proprement dit

     Le sujet du roman est classique : la colonisation d’une planète pénitentiaire. Des humains et divers extraterrestres sont abandonnés sur une planète qui semble inhabitée. Pour survivre, ils doivent se débrouiller avec seulement un couteau, une couverture et les quelques rations qu’on a bien voulu leur laisser. Les conditions sont bien entendu très difficiles, mais le ton du roman est très léger. Les personnages parlent toujours « en souriant », « avec facétie » ou « d’un air taquin ». En plus, l’extra-terrestre a de jolies fesses. Mais va-t-il vraiment coucher avec la belle héroïne ? Ce n’est pas si évident, je vous laisse découvrir la suite dans le roman.
     Dans Terre de liberté, les personnages ne présentent aucune profondeur psychologique, bien qu’ils aient été beaucoup travaillés en amont. Chacun·e a une fonction bien précise, au sein de la colonie, mais aussi du roman. Ainsi, vous avez droit au cuistot de service, au rebelle de service, au pro-militaire de service, au boulanger de service, à la jolie fille de service, au traître (mais est-ce vraiment un traître ?) de service etc. Cela pourrait sembler manquer de finesse, mais rien n’est ni trop grossier ni caricatural, c’est un roman léger et sympathique.


Une image de Flo Maderebner sur Pexels *


     Traduction parfois étrange

     Il y a certains passages que je n’ai pas compris ou quelques faux-amis oubliés : par exemple « sketch », pour croquis, qui revient à plusieurs reprises. « Éventuellement » (eventually) pour « finalement ». Ou un personnage qui demande à un autre s’il a passé l’examen. Oui, il l’a passé, il vient de nous le dire, mais l’a-t-il réussi (passed en anglais) ? D’autres expressions sonnent bizarrement : « Comme il ne s’était toujours rien passé à midi plein » p. 260 ou, page 291 « Kris n’eut pas le courge de regarder », ou encore, page 293 « elle s’effondra pour le compte ». On retrouve cette expression p. 305 « elle avait dû l’allonger pour le compte » (signification ?). Page 308, on lit « On a des gars vraiment ficelle » . L’expression est, là encore, répétée plusieurs fois, je n’ai absolument aucune idée de ce que cela peut bien vouloir dire. Pareil pour « Mais ce qu’il leur montrait n’exigeait ni futilité ni silence ». Page 159 « nous pouvons vivre sur le pays » (sur ou dans ?). Page 333, on nous parle d’« avions parqués nez dans queue  ». L’héroïne du livre, Kristin, apprend à parler à un extra-terrestre, Zainal. Ce dernier a beaucoup de mal avec les expressions idiomatiques, par exemple « mon vieux ». Et une expression lui donne beaucoup de fil à retordre : « La dent de l’œil ». Cette expression est reprise à de multiples reprises, comme par jeu, tout au long du livre, et comme si elle était ultra courante en français. Mais, tout comme Zainal, j’ai eu bien du mal à la comprendre. D’après le contexte, il semblerait que cela signifie que quelque chose est difficile, demande beaucoup d’efforts ou coûte très cher. Mais j’ai eu beau chercher, en anglais, et en français, je n’ai pas trouvé à quelle expression cela pouvait faire référence. D’après toutes les définitions que j'ai trouvées, la « dent de l’œil » est une expression pour désigner une canine, cette dent qui se trouve juste sous l’œil. Cela ne nous éclaire pas vraiment pour le texte. Cela pourrait passer si l’expression était utilisée une ou deux fois, mais elle revient très souvent, sur un très grand nombre de pages.
     Rassurez-vous, le nombre de fautes n’est pas rébarbatif et n’entrave pas trop la lecture. Mais c’est bien dommage de ne pas les avoir corrigées, car le texte est par ailleurs très fluide et assez plaisant à lire. Serait-ce trop demander à l’éditeur de faire corriger ses publications ?


Une image de Tom Fisk sur Pexels *


     Science-Fantasy ?
     La couverture présente un bandeau noir où l’on lit distinctement la catégorie à laquelle appartient le livre : « Science-Fantasy ». Terre de liberté est indéniablement un livre de science-fiction : on y croise des machines inconnues, de gros vaisseaux spatiaux, des extraterrestres, on nous parle du ciel distinctif de cette planète qui n’est pas la Terre etc. 
     En revanche, il n’y a aucune magie, pas de surnaturel, encore moins de dragon (bon, d’accord, on rencontre quelques bestioles bizarres comme les vaches-leuh, car au lieu de faire meuh, elles font « leuh » !). Mais je n’ai pas bien compris où était la fantasy là-dedans. Il est à noter que l’éditeur, Presse Pocket, est le premier à avoir introduit le nom de cette nouvelle catégorie en France, justement pour un livre d’Anne McCaffrey. Peut-être a-t-il voulu l’appliquer à tous les romans de cette autrice, afin de capter l’attention des fans de science-fiction, et aussi celle des fans de fantasy ? En tout cas, les amateur·trices de fantasy pure risquent d’être déçu·es. Au demeurant, l’éditeur aurait dû classer ce roman en « Science-Fantasy-Romance-Revival ». Cela lui aurait permis d’englober encore plus de monde. Mais il n’a pas osé. Et d’ailleurs, dans la réédition du livre, il n’a même plus rien mentionné du tout !


Une image de Fancycrave.com sur Pexels *

     Le court extrait
     – Pour ceux qui ne le savent pas, ce sont les Deskis qui ont découvert les grottes qui nous abritent. Je ne crois pas que nous les aurions trouvées. Ils grimpent comme les araignées auxquelles ils ressemblent, mais ce sont des humanoïdes comme nous. Je ne veux plus les entendre traités d’araignées. Compris ? Alors écoutez-moi bien. Ils ont été arrachés à leur planète comme nous, et nous les traiterons comme nous traitons l’un d’entre nous – parce que chacun d’eux est l’un d’entre nous. Ai-je été assez clair ?
     Tout le monde vociféra son approbation, ce qui rassura Kris. Elle essaya de repérer les récalcitrants.
     – C’est un Deski qui a porté l’enfant de May Framble pendant les deux jours de marche, sans jamais se plaindre une seule fois, dit Mitford, dont l’expression réfrigéra les réticents. Alors n’oubliez pas qu’ils sont dans la même galère que nous, et qu’ils tirent leur propre poids… enfin, le peu de poids qu’ils ont. Et les Rugariens font aussi partie de nous, selon le même principe. Ils ont rapporté plus de gibier que les chasseurs humains. Ce sont des as de la fronde !




Photo tirée de Time Out of Mind, épisode 4, mini-série de la BBC2 consacrée aux auteur·trices de science-fiction (1979). Disponible sur Youtube ► ICI 


     Notice de l’autrice
     Anne McCaffrey est née aux États-Unis, dans le Massachusetts, en 1926. Elle est décédée en Irlande, dans sa dernière demeure, en 2011, à l'âge de 85 ans.
     Elle a fait des études de littérature, de langues slaves, et a entamé une courte carrière au théâtre. En 1953, une de ses nouvelles est publiée par le magazine Science-Fiction Plus. Anne McCaffrey élève ensuite ses trois enfants et, tandis qu'ils sont à l'école, elle se remet à écrire. Son premier roman paraît en 1967. L'année suivante, elle commence à publier, aux États-Unis, les premiers tomes de la Ballade de Pern, cette immense saga de fantasy qui rend son autrice mondialement célèbre, et a même donné naissance à plusieurs jeux vidéo se déroulant dans le même univers.
     Anne McCaffrey a écrit et co-écrit des dizaines de romans, de science-fiction, de fantasy et de science-fantasy, de nombreuses nouvelles, et même un roman policier. Ses textes ont reçu une multitude de prix et, en 2005, à l'instar de ses consœurs Ursula LeGuin et Connie Willis, dont nous avons déjà parlé, Anne McCaffrey reçoit le titre suprême de « Grande Maîtresse de la Science-fiction » (Grandmaster of Science Fiction). Ce prix, attribué par l’association américaine des auteurs de science-fiction et de fantasy (Science Fiction Writers of America ou SFWA), récompense un auteur ou une autrice vivant·e, pour la totalité de son œuvre.

     Bonne lecture !



Vous aimerez aussi :
Pollen, de Joëlle Wintrebert
♦ Le grand Livre, de Connie Willis
♦ La Main gauche de la nuit, par Ursula Le Guin
♦ Les Yeux d’ambre, de Joan D. Vinge
♦ Le Secret de Sinharat, par Leigh Brackett


***
Toutes les images marquées d'un * sont sous licence Creative Commons :
 * CC BY 2.0 - Attribution 2.0 Générique - Aucune modification


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire